Grignon : lettre intersyndicale aux directions de l’Agro et de l’INRAE

, par  Secrétariat BL , popularité : 24%

Lettre du 5 avril 2021 à Messieurs Trystram et Mauguin, respectivement Directeur général d’AgroParisTech et Pdg de l’INRAe, des organisations syndicales Sgen-CFDT, Syac-CGT, FSU, SUD Rural Territoires d’AgroParisTech et CFDT-INRAe, CFTC-INRAe, CGT-INRAe, SUD Recherche de l’INRAe.
Voir en doc joint.

Ou ci-après :

Messieurs,
L’ensemble des organisations syndicales d’AgroParisTech et de l’INRAe soutient le mouvement initié par les étudiants du site de Grignon, depuis le 16 mars 2021.
Les questionnements des étudiants sont clairs :

-  la crainte de voir disparaître des terres agricoles exploitées intra-muros (120 Ha) avec le risque de mettre en péril la ferme expérimentale de Grignon, la crainte de dégradation des essais patrimoniaux par manque de suivi,
-  la crainte de voir disparaître les six points d’intérêt géologique du site (Falunière,…), dont certains sont reconnus internationalement et dont l’étude vise à comprendre l’évolution du climat et de la biodiversité au Tertiaire, à l’aube de la sixième extinction de masse,
-  La crainte de voir disparaître une partie des 219 Ha d’espaces naturels, considérés « zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique de type II » par l’inventaire national du patrimoine naturel, de voir disparaître le jardin anglais et l’arboretum historique. Grignon constitue un sanctuaire de biodiversité et un havre inestimable pour tout type d’espèces alors que les scientifiques en général et de nos institutions en particulier alertent quotidiennement sur la perte de biodiversité,
-  la crainte de ne plus pouvoir accéder aux ressources naturelles du site, pour les experts et les amateurs et de perdre l’atout que représente Grignon pour sensibiliser le public à l’agriculture, l’agronomie, l’étude du vivant et la protection de l’environnement.
-  la crainte de voir la construction de bâtiments non énergétiquement performants et artificialisant les terres, au-delà de l’existant.
Ces questionnements sont légitimes pour des étudiants qui ont rejoint AgroParisTech, établissement d’enseignement supérieur dont les missions et domaines de compétences clairement affichés sont « l’alimentation des hommes et les préoccupations nutritionnelles, la santé, la prévention des risques sanitaires, la protection de l’environnement, la gestion durable des ressources naturelles et, d’une manière plus générale, la valorisation des territoires », dont l’ambition est « d’être un acteur clé de l’enseignement supérieur français et européen de la formation et de la recherche sur l’usage des bio-ressources principalement issues de l’agriculture et de la forêt, pour des finalités notamment liées à l’alimentation, la bio-économie, l’environnement et la santé, ainsi que la préservation des ressources naturelles et d’avoir des activités académiques menées en connaissance des enjeux de société et en prenant en compte les questions de développement et de transitions. AgroParisTech s’inscrit ainsi naturellement comme contributeur aux objectifs du développement durable des Nations unies, au confluent de nombre d’entre lesquels il se trouve. »
Les questionnements des étudiants sont légitimes alors qu’ils côtoient les enseignants-chercheurs et les chercheurs d’unités mixtes de recherche avec l’INRAe dont la feuille de route à l’horizon 2030, vise à relever les défis de l’agriculture, de l’alimentation et de l’environnement de demain et répondre aux « attentes sociétales vis-à-vis de la recherche sur les enjeux d’ atténuation et adaptation au changement climatique, de sécurité alimentaire et nutritionnelle, de santé humaine et santé de la planète, de transition des agricultures, de préservation des ressources naturelles, de restauration de la biodiversité, d’anticipation et gestion des risques ».

Alors oui, nous soutenons pleinement les étudiants dans leur action et, malgré les promesses faites par l’administration sur certains sujets évoqués par les étudiants, nous avons les mêmes interrogations. Nous travaillons dans des institutions affichant de belles intentions, mais qui ne les mettraient pas en pratique en laissant le domaine de Grignon tomber dans les mains de promoteurs immobiliers qui ne prendraient pas en compte son caractère de bien commun. Nous interpellons nos directions d’établissement sur cette incohérence choquante et leur demandons d’interpeller leurs ministères de tutelle pour exiger de l’Etat des garanties fortes sur la transparence du procédé d’évaluation comme sur la nature du projet qui sera choisi pour Grignon afin de préserver ce bien commun dans toutes ses dimensions. C’est ce que les étudiants demandent, nous le demandons également.

Nous vous prions d’agréer, Messieurs, l’expression de notre considération respectueuse.